Two many coaches (ou comment réussir ma transformation agile)

Les amateurs de musiques électro connaissent sans doute le duo Two Many DJ’s (personnellement je suis fan, enfin j’étais)

Et si aujourd’hui c’était « Two Many Coaches » ?

C’est un fait, il y a une explosion de coaches, notamment « agile ». La concurrence devient plus rude. Il s’agit plus que jamais de travailler son identité, sa singularité.

En soi c’est une bonne nouvelle. Avec l’adoption croissante du phénomène agile et de la fameuse Entreprise Libérée, il est évident que le corollaire est la nécessité de coaches afin de pouvoir agir sur les transformations en entreprise. Tous ces concepts ne se décrètent pas, ils s’accompagnent. Dont acte.

Si je fais ma rétrospective, j’ai commencé par une longue période de développement puis j’ai suivi le mouvement de l’époque en devenant chef de projet, responsable qualité & méthodes et enfin consultant pour donner des conseils aux autres d’après ce que j’avais appris. La touche finale, plus qu’indispensable, est beaucoup de posture basse en me formant au coaching. Ma découverte fracassante de l’agilité ayant eu lieu en 2001, par le bouquin « Extreme Programming Explained » de Kent Beck. Grand saut d’indépendance en 2008, et coach agile régulier quelques années après. Quelques mentors et amis (l’ordre n’a pas d’importance) : Deming (la roue), Thierry Cros (acrobate du code et des Toltèques), Claude Aubry (les repères de Scrum), Olivier Azeau (clean code addict), Jean-Marie Damas (regretté passionné), Régis Medina (XP, Lean et j’en passe), Laurent Bossavit (frenchy ambassadeur), Pascal Roques (la classe UML), Romain Bernard (MDD > MDA), Alex Boutin (Lean lover) et les gars qui m’ont lancé dedans avec une mise en œuvre périlleuse de XP.

Je m’interroge aujourd’hui sur ce qui va faire qu’on préfère un coach plutôt qu’un autre. Évidemment j’ai quelques pistes : l’expérience, la certification, les recommandations, la reconnaissance par les pairs, la qualité de la propale, le hasard et enfin, bien sûr, le prix. Ce qui m’amène à une réflexion sur l’efficacité du coach. Restons sur le domaine du « coach agile » si vous voulez bien, qui ne s’effectue pas dans les mêmes conditions commerciales que du coaching tout court. Souvent le premier est mandaté par les opérationnels ou les départements qualité/méthodes des SI, le second par les ressources humaines (avec des variantes selon les cas).

Voici à mon avis quelques critères de choix qui devraient mobiliser l’attention du sélectionneur :

  • L’expérience du terrain : en développement et en management. Est-ce que la personne a suffisamment d’années opérationnelles pour pouvoir donner des conseils aux autres ?
  • La veille : maîtrise des tendances récentes et contribution à la communauté. Je me tire une balle dans le pied pour le second ! J’ai beaucoup donné au début mais quasiment plus maintenant, occupé que je suis par ma vie privée chronophage.
  • Les recommandations : uniques justifications possibles en fin de missions
  • Le discours : le feeling du premier entretien est essentiel pour le client. j’aurais pu dire ici : le degré de confiance a priori qu’il consent.

Vous remarquerez qu’il n’y a pas… le prix. En effet, si le prix compte, c’est surtout le ROI qui importe. Je n’ai aucun problème avec cette notion. Nous sommes perçus comme cher, ce qui est vrai par rapport à beaucoup de « grilles ». Mais que devient l’investissement, à la lumière des économies réalisées par la suite ? Que coûte réellement l’accumulation de stocks de fonctionnalités, les livraisons tardives, les discordes, les organisations mal taillées ? Difficile à évaluer j’en conviens, mais l’exercice mériteraient d’être fait. Et cela est possible pour celui qui s’y pencherait (bon ben, j’ai plus qu’à m’y coller). A l’inverse, quelle est la rentabilité du coach qui ne satisfait pas aux critères précités : sans doute possible mais plus aléatoire vous en conviendrez.

Et pourtant, il ne peut pas y avoir d’engagements de résultats pour un coach agile, seulement, un engagement de moyens (et c’est heureux ainsi). Mais le client n’a-t-il pas le droit à d’efficacité dans cette aventure ? Et comment la mesurer ? Si on ne peut pas facilement mesurer le succès d’une prestation de coaching, on peut toujours mesurer celui de la transformation et apprécier la maîtrise du coach (ou pas), dans cette démarche. Ce qui m’amène aux critères de succès d’une transformation agile qui est LE droit en question (entre autres).

Première chose : le coach doit rapidement amener son client à s'interroger sur les raisons du projet et à exprimer lesdits critères. Et plus encore : sensibiliser son client à l’intérêt d’impliquer ceux qui vont vivre la transformation à la définition de ses critères, dès le départ.

Quelques exemples que j’ai élaboré avec mes clients, à mesurer avant, pendant et après (mais y a-t-il un « après » sur quelque chose de « continu » ?) :

  • le bien être au travail sur une échelle de 1 à 5
  • le délai de mise à disposition des versions aux utilisateurs : est-il raccourci ?
  • le nombre de retours positifs et négatifs des utilisateurs : un classique à garder, plus que jamais
  • le niveau de confiance sur le respect de délai de la part des équipes sur une échelle de 1 à 5
  • le nombre de besoins spécifiés en attente d’être développés ou livrés : est-il diminué ?
  • le nombre de documents : diminue-t-il ?
  • le taux d’actions d’amélioration qui apporte de la satisfaction aux équipes : augmente-il ?

Si tout est mis en œuvre honnêtement pour produire, suivre, publier ces indicateurs et surtout réagir dessus, alors le client se donne une chance, au mieux de réussir sa transformation, au pire de l’adapter avec tout ce qui est possible pour redresser la situation, bien au delà du framework agile, dussions-nous ne plus prononcer ce vilain mot.

Client, choisissez d’abord vos coaches agiles avec la maturité et l’aisance de pouvoir vous guider dans la définition d’objectifs pertinents et atteignables. Vous êtes septique et vous avez raison. Il paraît qu’on ne pas se passer de coaches agile pour ce que nous voulons faire, mais pourquoi ? Je vous renvois à la présentation que j’avais donné à l’Agile Tour Toulouse ne 2010 : « Adopter l'Agilité : le kit pour convaincre » dont le propos était d’aider le client à y voir plus clair dans ce monde de passionnés et de déjouer les discours prometteurs creux auxquels ils ont si souvent affaire. En gros, un peu d'humilité s'il vous plait, il ne nous a pas attendu pour faire du soft...

Il ne suffit pas de faire le clown avec des post-it en réunion (mais c’est déjà un bon début ;-) ou de faire de beaux slides stylisés agiles. Il faut pouvoir appliquer une démarche scientifique afin de favoriser les chances de succès, ce qui demande expériences et garanties.